vendredi 28 décembre 2007

Double propagande pro-métissage et anti-créationniste au 13h de France 2


Au 13h de France 2 ce 28 décembre 2007, les journalistes du service public nous avaient concocté un reportage sur une bande dessinée pour les enfants, sur Lucy et son histoire.

Les journalistes reconnaissent que, comme nous ne savons scientifiquement à peu près rien de cette histoire, le scénariste et le dessinateur ont quasiment tout inventé. Idéal pour voir quels genres d'idées nos chers journalistes sont prêts à relayer dans l'espace public sans avoir besoin de la moindre preuve.

La présentation tout d'abord : cette BD de Lucy permet "aux enfants d'apprendre beaucoup de choses", selon la présentatrice Elise Lucet. Moi, quand on cherche à faire apprendre quelque chose de vrai aux enfants via la BD, je ne sais pas pourquoi, mais je me méfie. Sans doute parce que j'ai beaucoup lu Tintin, Astérix ou encore la Bible en BD étant plus jeune. Passons.

"A l'origine de cette histoire, un fait réel" nous dit la voix off pour commencer : on peut en dire autant du romanquête de BHL sur la mort de Daniel Pearl, qui est pourtant un tissu de mensonges. Mais cette apparence de réalité permet justement de tout justifier, et surtout de tout mélanger, vrai et faux. Tu parles d'une bonne manière d'apprendre aux enfants...

La voix off continue sur les images qui défilent :

"Finalement l'histoire s'avère plus riche qu'il n'y paraît. Avec des luttes de pouvoir au sein d'un clan. Dans un milieu hostile, des êtres en situation de survie permanente. Et puis surtout, il y a cette rencontre, entre Lucy, et ce mâle d'une autre espèce, comme la première union mixte de l'histoire de l'humanité. Au final, un conte de presque 4 millions d'années."

Ainsi donc, à la télévision publique, les journalistes (la nouvelle clérocratie selon Régis Debray) nous racontent Adam et Eve, façon post-moderne. Sans le dire, tout en suggestion et surtout (notez le "surtout" de la voix off) en bons sentiments. Cette nouvelle religion exclut les créationnistes comme l'ancienne religion excluait les évolutionnistes. Où est le progrès ?


Quel journaliste informera le public que tous les créationnistes ne croient pas aux mêmes choses, tout comme les évolutionnistes ne croient pas tous à la même chose ? Les créationnistes sont ceux qui croient que Dieu a créé le monde, ce qui regroupe tout de même une majorité d'êtres humains vivants actuellement sur Terre. Mais nos médias préfèrent faire croire que les créationnistes sont comme ces Américains givrés qui expliquent que la Terre a été créée il y a 6 000 ans par Dieu, et tout ce qui est écrit dans la Bible s'étant passé exactement ainsi. Joli conte que celui-là...
Il est pourtant interdit de croire autre chose, sous peine de recevoir ce genre d'invectives : ignorants, idéologues, fondamentalistes, bornés, stupides, propagandistes, obscurantistes, illuminés, faussaires scientifiques, incultes, escrocs, obstinés, frivoles, faux candides, obscurantistes, inquisiteurs, menaces pour la science, extrémistes qui disent des fadaises, hérétiques qui élucubrent.

Le scientifique qui m'expliquera comment l'évolution a créé une queue pour que mon chat garde son équilibre, ce qui est la version incontestée aujourd'hui de l'utilité de la queue des chats, n'est pas encore né. Les créationnistes ne nient pas la sélection naturelle, d'ailleurs comment le pourraient-ils ? Ils font même remarquer que Darwin lui-même ne se l'expliquait pas, il la constatait mais son origine restait un mystère. Par contre ils nient l'évolution, c'est-à-dire la création par hasard ou intelligence de la nature (ce qui s'appelle l'animisme en fait) de choses aussi complexes que la vie, l'ADN, l'âme, la conscience, les cinq sens, etc. Les Américains ont cette intelligence par rapport à nous, c'est de laisser les gens s'exprimer, et de ne pas les excommunier dès qu'ils dévient de la vision dominante.


Regardons les faits. Est-on absolument sûr et certain que Dieu n'a pas créé le monde et la vie ? En a-t-on la preuve ? Il faut croire que non :
« La génération spontanée n’existe pas. Mais alors, un nouveau problème se pose. Si le vivant ne provient que du vivant, comment expliquer l’origine de la vie ? Au 20ème siècle, les biologistes ont tenté de répondre à cette redoutable question. Les grandes étapes du scénario traditionnel de l’apparition de la vie sur notre planète sont bien connues. Elles se seraient déroulées en deux temps : une phase physico-chimique, puis une phase biologique. Une synthèse chimique des composés de base nécessaires à la fabrication des matériaux entrant dans la constitution de la cellule est nécessaire. Ces composés se seraient accumulés dans des océans primitifs, formant un « bouillon de culture », ce qu’on appelle une « soupe prébiotique ». Puis, probablement à la surface de certains minéraux comme l’argile, ces éléments de base se seraient assemblés pour former des macromolécules. En plusieurs millions d’années, ces macromolécules se seraient auto-assemblées, auto-organisées pour former les premiers systèmes vivants capables de s’autoreproduire, et d’évoluer jusqu’à ce qu’émerge la première cellule. […] On a pu produire la totalité des acides aminés au cours d’expériences réalisées en phase aqueuse ou gazeuse. […] Autrement dit, ces chercheurs ont créé, à partir de la matière non vivante, les matériaux de base constitutifs de la cellule. Mais cette synthèse ne résout toujours pas le problème de l’origine de la vie. Car les six éléments chimiques cités plus haut peuvent s’associer sans pour autant former de la matière vivante. […] Une autre question se pose alors : la vie serait-elle spécifique à la Terre ? L’enjeu est considérable : en effet, la science ne sait traiter que d’événements reproductibles, ou au moins récurrents. L’approche scientifique demeure totalement démunie face à un phénomène biologique unique, qu’elle ne peut reproduire pour l’étudier. Si la vie est un phénomène spécifique à notre planète, alors l’étude de son origine devient impossible. » Quand la science a dit… c’est impossible !, sous la direction de Nayla Farouki (philosophe et historienne des sciences), Jean-Michel Alimi (chargé de recherche au CNRS, astrophysicien), Gilles Dowek (chargé de recherche à l’INRIA), Laurence Rolland (titulaire d’un doctorat d’Etat en biologie humaine), Editions du Pommier, 1999, p. 65-66



Le site où est présenté la BD sur Lucy nous indique tous les médias qui ont dit du bien de ce livre : Marianne, Le Figaro Magazine, Le nouvel Observateur, 20 minutes, Lire, TGV Magazine, Bodoï, Ici Paris, lci.fr, Ouest France, L'Est Républicain, La voix du Nord, L'Echo des Vosges, Le Courrier Picard, Sud Ouest, Le Courrier de l'Ouest, La gazette Nord Pas de Calais, L'Indépendant, Lille Plus, La Dépèche du Midi, Marseille l'Hebdo, Le vif/L'Express, Le Soir (Bruxelles).


Une telle unanimité ne peut que démontrer la symbiose parfaite entre la thèse de cette BD et la doxa de l'époque, la double propagande anti-créationniste (ou athée) d'une part, pro-métissage (ou mixophile) d'autre part.



Le JT peut être encore visionné quelques jours sur ce lien.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu me connais, je suis athée. Je partage les explications scientifiques sur la création de la Terre, je ne crois pas en Dieu. Le fait que quelques scientifiques d'une époque donnée (actuelle) prétendent qu'il est impossible de déterminer certaines choses ne signifie rien selon moi. Il y a quelques siècles on aurait dit qu'il était impossible de prouver que la Terre tournait autour du soleil ou que les noirs avaient une âme. Dans quelques siècles peut-être certains scientifiques prétendront-ils que l'on peut tout expliquer. Les connaissances actuelles sont seulement peut-être limitées.

Ensuite peu importe que la majorité des personnes vivant dans le monde croient que Dieu a créé la Terre, puisque ce JT est Français et que je doute qu'en France ce soit toujours le cas.

Là où le bât blesse c'est lorsque l'athéisme prétend se substituer au catholicisme en tant que religion d'Etat pour faire de la propagande idéologique. J'aurais trouvé scandaleux de faire passer des idées religieuses et je préfère voir des exposés scientifiques, ce qui ne doit (selon moi) pas être mêlé à l'idéologie. Tu vois avant ton article la seule image que j'avais des créationnistes était celle des obscurantistes, tout comme les personnes ne s'étant pas renseignées sur le sujet ne savent pas que le révisionnisme ne concerne pas une seule période de l'Histoire mais est une méthode scientifique applicable à l'ensemble de cette discipline (comme je le pensais également il y a encore peu).

Quant à Lucy et cette ridicule apologie de la mixophilie (mixomanie? ;-) ) je trouve tout bonnement scandaleux d'inculquer cette idéologie aux enfants par le biais de supports soi-disant de divertissements qui distillent en réalité la propagande la plus indigeste. Une baboune qui se fait taper le derrière par un babouin d'une autre espèce présenté comme un signe de progrès social? Dis-moi que je rêve là... A croire que l'on était là pour pouvoir analyser les rapports amoureux inter-raciaux chez les singes en les supposant teintés d’émancipation face au fascisme simiesque racialiste d’il y a 4 millions d’années. Le prochain coup ce sera quoi? Lucy qui a travaillé plus pour se nourrir plus? Lucy qui a manifesté pour l'abolition des frontières de sa grotte? Faut arrêter le délire au bout d'un moment... qui plus est sur une chaîne de service public (paraît-il)…

Anonyme a dit…

"Et puis surtout, il y a cette rencontre, entre Lucy, et ce mâle d'une autre espèce, comme la première union mixte de l'histoire de l'humanité."


je doute que Lucy ait pu se reproduire se reproduire avec un mâle D'UNE AUTRE ESPÈCE. Peut-être que ce n'était pas le cas à l'époque de Lucy mais à ma connaissance il n'y aujourd'hui que quelques espèces sur des milliers qui sont interfécondes, typiquement des espèces génétiquement très proches l'une de l'autre. Alors pour cette connerie de "nous sommes tous le produit du métissageuh !" on repassera d'autant plus que nous sommes certainement beaucoup plus tous le produit d'unions consanguines. Nos ancêtres à l'époque où ils étaient peu nombreux se reproduisaient entre eux à l'intérieur de leurs communautés - une intensive endogamie.

(suis athée moi aussi en passant)

Jean Robin a dit…

Voici un échange avec un lecteur du blog, que je reproduis avec son aimable autorisation.

Lecteur :
Je viens de lire l'article que tu as publié sur ton blog et je suis obligé de réagir car j'ai l'impression que plusieurs choses s'y mélangent.

En premier lieu je veux parler créationnisme. La définition de ce terme ne donne pas le moment précis de l'intervention divine : cela peut aller de la création de l'univers par le big-bang à la création de l'homme (Adam et Eve) selon les gens, selon les croyances. Je suis content de ne pas avoir à discuter avec toi de la possibilité du créationnisme tel qu'on a l'habitude de l'opposé à la théorie de l'évolution. Une Terre de 6000 ans avec Adam et Eve, affirmer une telle chose à notre époque revient peu ou prou à affirmer que la Terre est plate...

La définition du mot créationnisme qui est discutée dans ce texte place l'intervention divine au niveau de la création de la vie. C'est à dire l'étape qui permet de faire se rejoindre l'apparition des premiers acides aminés à l'apparition de la première cellule. Il est vrai que les connaissances scientifiques de cette étape qui a probablement duré plusieurs millions d'années sont très sommaires. Il est donc possible d'émettre l'hypothèse d'une intervention divine. La science n'est pas un dogme et accepte toutes les hypothèses. C'est le principe même du raisonnement scientifique : concevoir une hypothèse et venir en démontrer la validité par la pratique. A mon sens, cette hypothèse ne pouvant être démontrée gardera toujours le statut d'hypothèse. Mais passons, car cela relève de ma croyance personnelle.

Mon soucis est le suivant : tu annonces dans ton titre que la BD sur Lucy est une propagande anti-créationniste. Or, tu expliques toi même très bien que le créationnisme appliqué à l'apparition de la vie ne s'oppose pas à la théorie de l'évolution. Je ne vois pas alors en quoi cette BD s'oppose à ta vision du créationnisme. Elle s'oppose effectivement à la vision d'un monde où l'homme ne descend pas du singe, rien de plus. Hypothèse que tu dis toi-même stupide : « américains givrés ». La discussion qui s'en suit sur la façon dont les médias cherchent à nous faire prendre les créationnistes pour des hurluberlus relève donc à mon avis du procès d'intention et n'est pas du tout démontré dans cet exemple précis.

Enfin, en ce qui concerne la propagande pro-métissage, tu me verras plus réservé. En effet, j'ai déjà vu de nombreuses reconstitutions de la vie de Lucy et il est étonnant de voir comme chacun y projette son affect, racontant ce qui convient à sa vision propre de l'humanité. Toutefois, il est vrai que l'étude de l'ADN mitochondriale à permis de constater que le brassage génétique avait été intense et il n'est pas impossible que plusieurs espèces d'Omo aient pu coexister à cette époque, devenant même parfois inter-fécondes. Sinon, petite question comme ça, préférerais tu que les médias fassent l'apologie du non métissage c'est à dire du communautarisme ?

JR :
Sur les créationnistes : aucun créationniste, givré ou non, ne croit que Lucy est l'ancêtre de l'homme, puisque si Dieu a créé la vie, et les espèces telles qu'elles sont (adaptation à leur milieu naturel mis à part), l'homme ne descend pas du singe.

La sélection naturelle, que reconnaissent tous les créationnistes, ne permet pas d'expliquer scientifiquement l'évolution du singe à l'homme. Je n'ai pas parlé de ça dans mon papier, j'aurais pu...

La sélection naturelle consiste à s'adapter à son milieu mais sans création :
- soit que les caractéristiques déjà présentes permettent de mieux survivre que les autres (une espèce de gazelle qui court plus vite qu'une autre et qui échappe ainsi mieux aux prédateurs),
- soit que les caractéristiques changent au contact du milieu naturel (bombyx qui devient noir avec la pollution et qui se fond dans son environnement en échappant ainsi aux prédateurs).

Voilà pourquoi je dis que l'évolution n'explique pas pourquoi mon chat a une queue, puisqu'elle lui est utile pour équilibrer son corps. Comme la plupart du temps, un organe ou une autre partie du corps (les plumes par exemple) ne servent que complètes, sans possibilité de stade intermédiaire, puisque la sélection naturelle se chargerait d'éliminer ces stades-là, qui seraient improductifs et handicaperaient l'être vivant qui les aurait. Par ailleurs une plume seule ne sert à rien, pas plus qu'une seule aile, il en faut deux recouvertes de plumes pour pouvoir espérer voler. Mais les deux ailes couvertes de plumes sans les muscles suffisamment puissants pour les agiter sont tout aussi inutiles. C'est un tout... ou rien. Et nulle intelligence dans la matière pour avoir cette vision à long terme, "créons des plumes suffisamment nombreuses, bien réparties et accrochées d'une telle manière qu'elles pourront résister à la pression de l'air, et une musculature suffisante pour voler". Concernant la pression de l'air, un organisme ne peut pas la connaître tant qu'il ne l'a pas ... connu. Or pour le connaître il faut avoir les plumes, la musculature, etc. On ne voit pas un être vivant essayer des millions de fois sur des millions d'années afin que ses plumes deviennent efficaces, ou poussent, ou je ne sais quel phénomène magique qui lui permette de voler. Les plumes sont par ailleurs extrêmement sophistiquées, dignes de la perfection, et on ne leur connaît pas de stade intermédiaire, ni parmi les espèces vivantes, ni dans les fossiles.

L'évolution, hors sélection naturelle, prétend que la nature a intelligemment créé des fonctions souvent fort complexes par hasard (ou par le dieu de l'animisme). Ainsi, un singe serait devenu un homme, avec une conscience, une âme, une intelligence supérieure, comme ça, par un coup de baguette magique. Le film 2001 l'Odyssée de l'espace est de ce point de vue très parlant : on est dans le mythe. On ne sait ni quand, ni comment, mais peu importe, c'est ainsi. On ne connaît pourtant aucune espèce de singe vivant qui soit dans le stade intermédiaire de la "prise de conscience", tout comme on ne connaît aucune espèce vivante qui soit un stade intermédiaire entre deux stades de l'évolution. Or il n'y a pas que dans les fossiles qu'on devrait en avoir la preuve : notre environnement immédiat, actuel, est également la preuve de millions d'années d'évolution. Où sont les reptiles apprenant à voler ? Où sont les singes hominisés ? Où sont les poissons avec des pattes ?

Tu vas peut-être me dire que ces derniers ont existé, mais il a été démontré que c'est parce qu'ils avaient déjà des pattes et des poumons qu'ils étaient montés sur la terre ferme :
"Evolution folle. Une salamandre à quatre pattes accouche de l'humanité. La mâchoire d'un tétrapode vieux de 365 millions d'années bouscule la théorie des espèces !
C'est l'histoire d'un fossile belge, une mâchoire aux dents largement espacées et recourbées qui met en pièces toute l'histoire de l'évolution. En étudiant la mandibule qui dormait dans un tiroir, un jeune paléontologue du Muséum d'histoire naturelle, Gaël Clément, a démontré qu'elle n'appartenait pas à un poisson doté de nageoires comme on l'avait cru pendant plus d'un siècle, mais à un vertébré à pattes, un tétrapode vieux de 365 millions d'années. La chronologie de l'évolution de l'espèces en est bousculée : non, ce ne sont pas les poissons d'eau douce qui, à force de se traîner le ventre à l'air dans des marais asséchés, se seraient vu "pousser des pattes". Il semble bien que ce soient au contraire des tétrapodes qui se la coulaient douce à quatre pattes sous l'eau et qui, lassés du milieu aquatique, ont fini par poser leurs pattes à terre. Profitant de l'oreille interne et des petits poumons dont la nature les avait pourvus, ils étaient avantagés pour se lancer dans la course et accélérer le cours de l'évolution. Autrement dit, c'est l'organe qui a précédé la fonction : les gambettes ont précédé la marche à pied, et non l'inverse." Marianne, 1er au 7 mars 2004, p.21

Voilà ce que je voulais dire, j'espère que j'aurais été plus clair, en tout cas merci d'avoir pris le temps de me répondre.

Concernant la propagande pro-métissage, l'anti-pro-métissage n'est pas le communautarisme, c'est l'anti-métissage qu'il l'est.

Lecteur :
je n'avais pas tout à fait compris la définition que tu lui donnais. Du coup, de nouvelles interrogations naissent pour moi. Tu dois te douter que je ne partage pas du tout ce point de vu et je dois avouer que jusqu'ici je n'avais jamais eu à défendre la théorie de l'évolution en tant que telle. En revanche, j'ai moi aussi eu des interrogations à son sujet.

Prenons les choses une part une, je dois dire que je ne vois pas trop la contradiction entre l'hypothèse d'une intervention divine lors de la création de la vie et la possibilité d'une évolution. Après tout si Dieu est le grand créateur, pourquoi n'aurait-il pas tout planifier pour que la finalité de l'évolution soit l'être humain. Peut-être que les gens qui pensent cela (et il y en a beaucoup dans le milieu scientifique) ne se revendique pas créationnistes mais à mon sens s'en est une forme. Une autre vision de l'existence de Dieu est née au 20ème siècle (je fais une légère digression mais cette vision me semble jolie et j'y ai cru pendant quelques temps avant de devenir complètement athée). Cette approche est apparue avec le développement de la physique quantique et des évènements dits « chaotiques ». Certains physicien ont cru y déceler les premiers éléments imprédictibles de la nature et par conséquent la main de Dieu. Une façon pour Dieu d'agir sur le monde s'en en enfreindre les règles (qu'il aurait lui même créées au passage).

Mais revenons à l'évolution. Je suis spécialisé en biologie moléculaire et cellulaire, je ne suis pas la meilleure personne pour défendre cette théorie (il faudrait un spécialiste en génétique des populations) mais je pense avoir quelques arguments. La première chose qui me chagrine c'est évidemment cette phrase toute simple : l'homme ne descend pas du singe (adaptation au milieu mis à part). Si je te suis bien, les hommes ont donc été créés à un instant T et placés sur Terre, la seule chose que tu trouvais absurde en réalité chez les « Américains givrés » étant la datation qu'ils donnent à tout cela. L'apparition des premiers homo-sapiens est actuellement datée de 100000 ans avant notre ère. Sommes nous d'accord là dessus ? Toujours est-il qu'il y a un soucis : que faire de tous les hominidés qui ont précédés homo-sapiens dans cette histoire ? C'est ennuyeux pour la théorie créationniste non ? Il en va de même pour tous les animaux disparus.

La génétique des populations a permis d'établir des arbres phylogénétique qui établissent les liens de parenté entre tous les animaux, tous les organismes de la planète, tout comme un test génétique permet de dire qui sont tes parents et tes grands-parents. En science, lorsqu'on souhaite contredire une théorie très bien argumentée et admise par la communauté scientifique, il faut présenter une nouvelle théorie, avancer des preuves. Pour la théorie de la création, il n'y a aucune preuve, aucune prédiction qui tienne la route. C'est pour cette simple raison que la communauté scientifique dédaigne parfois tout cela. J'ai été confronté récemment à quelqu'un qui me soutenait que l'homme n'avait pas marché sur la lune : il avait énormément d'arguments qui semblaient tenir la route. Il parlait de l'ombre porté de l'astronaute, du drapeau américain, de l'absence d'étoiles. Tout cela avait l'air construit, le problème c'est qu'avec un observatoire de grande puissance nous sommes capable de voir les buggys qui sont restées sur place ainsi que le réflecteur laser qui permet quotidiennement de mesurer la distance qui nous sépare de la lune. Inutile de dire qu'il y avait des explications à toutes ses interrogations : pourquoi il n'y a pas d'étoiles ? Surexposition du premier plan. Pourquoi le drapeau américain est éclairé des deux côtés en même temps ? Parce qu'il est transparent. Je n'arrêterais pas là la comparaison : cette personne est persuadée de l'existence d'un complot américain, c'est ce qui pré-existe à la moindre de ses réflexions. Il rejette en masse toutes les preuves du contraire. C'est un peu mon soucis avec les créationnistes, il ne s'agit pas d'un raisonnement scientifique, l'existence de Dieu et de son activité créatrice est pris comme corollaire et ensuite on cherche à adapter les preuves du contraire, ou alors carrément on les réfute.

Difficile alors pour moi de discuter quelque chose qui ne relève pas de la raison mais de la croyance. Même l'homme de science, doit faire parfois des actes de foie, se fier à son intuition, mais il ne s'oppose jamais à la raison. Cette introduction va me permettre maintenant de discuter les arguments que tu avances.

« La sélection naturelle, que reconnaissent tous les créationnistes, ne permet pas d'expliquer scientifiquement l'évolution du singe à l'homme ». Première nouvelle ! Les milliers de publications scientifiques qui en prouvent la validité depuis des années sont donc toutes fausses c'est évident, c'est le bon sens commun. Oui c'est évident à cause de la queue du chat qui a forcément été imaginée, il est impossible que cette queue soit sur ce chat par hasard puisqu'elle sert à l'équilibre de ce chat. Un chat sans queue aurait moins d'équilibre. Alors voilà l'explication de ce cas en particulier. Quand on considère l'évolution il faut la prendre dans son ensemble, car si on parle de la queue du chat il est obligatoire de parler de l'appendice caudale de tous les mammifères (sauf ceux pour qui il a régressé) et de leur ancêtre commun qui avait lui aussi une queue équilibrante. On peu remonter comme cela assez loin et trouver la présence d'un appendice caudale chez quasiment tous les ancêtres des Mammifères jusqu'aux poissons pour lesquels cet appendice servait de propulsion. Car ce qu'il faut bien comprendre c'est que dans la théorie de l'évolution l'existence précède l'utilité. En l'occurrence, l'utilité de l'appendice caudale à varié au cours de l'évolution. Chercher un sens à l'existence de la queue du chat est une vision finaliste qui présuppose une pensée créatrice, se poser la question en ces termes est déjà donc une erreur de raisonnement. Par contre sans utilité, une modification génétique n'est pas conservée très longtemps avec la pression de sélection.

Et en ce qui concerne la plume, je ne suis pas au courant de l'existence reconnue ou non d'une forme ancestrale. Toujours est-il que l'absence de preuve n'est pas une preuve de l'absence. Au passage il existe des lézard qui plane d'arbre en arbre en Amazonie. D'autre part il est possible de voler sans plumes (les Ptérodactyles, les chauves-souris). Et il n'est pas prouvé que l'utilité première de la plume fut pour le vol comme l'appendice caudale n'a pas toujours été équilibrant. La plume pourrait très bien avoir été avant tout un facteur de séduction... (qui entre aussi en ligne de compte dans la sélection naturelle).

Tu dis, un singe serait devenu homme comme ça d'un coup de baguette magique comme dans 2001 (merci pour la réf d'ailleurs j'adore ce film). Or non justement, cette apparition à pris plusieurs millions d'années. D'où, tous les hominidés qui précèdent homo-sapiens. Quand à l'apparition de la conscience de soi, sais tu que les scientifiques considère aujourd'hui que les grands primates encore présents sur Terre ont conscience d'eux-même. Au passage il existe des poissons avec des pattes fossiles qu'on appelle Sarcoptérygien et en particulier le Tiktaalik.

Personnellement, je me suis aussi parfois demandé si la sélection naturelle (prouvée) pouvait à elle seule expliquer l'évolution (prouvée). Avant Darwin, Lamarck avait proposé la théorie du transformisme (ce n'est pas une blague) et il semble que certains éléments moléculaires viennent alimenter cette vieille théorie. Mais pour le moment il n'est pas possible d'affirmer quoique ce soit catégoriquement.

Je terminerais par la découverte de Gaël Clément. Je n'ai pas lu l'article de Marianne, toutefois je connais ce cas et je ne comprends pas du tout l'interprétation que tu en fais (ou que Marianne en fait). J'ai déjà beaucoup écrit pour te répondre et je vais m'arrêter là, en t'engageant quand même à lire les articles de Gaël Clément et les interprétation qu'il fait de ses propres découvertes (il est le mieux placer pour le faire je pense)